Obésité de l’adulte : améliorer la prise en charge médicale des cas les plus sévères

Communiqué de presse - Mis en ligne le 23 juin 2022
23 juin 2022

La Haute autorité de santé (HAS) publie de nouvelles recommandations pour améliorer la qualité de la prise en charge médicale des adultes en situation d’obésité, et plus spécifiquement de ceux dont l’obésité est complexe ou sévère. Ainsi, dans une approche multidisciplinaire, la HAS clarifie les 2e et 3e niveaux de prise en charge afin d’accompagner les professionnels de santé dans leur mise en œuvre. Ces recommandations proposent des clés pour modifier durablement les modes de vie du patient dans un objectif qui ne se résume pas qu’à la perte de poids. Elles précisent également le rôle des soins de suite et réadaptation (SSR) dans la prise en charge.

Aujourd’hui, près de 8,5 millions de Français sont en situation d’obésité, soit une hausse de la prévalence de cette maladie chronique de 13 % depuis 2012, et même de 66 % pour les formes les plus sévères[1]. Pour accompagner la prise en charge d’une pathologie complexe, dont les conséquences sont souvent lourdes d’un point de vue médical, social ou psychologique, la HAS a élaboré de nombreux travaux depuis 2009. Elle publie aujourd’hui de nouvelles recommandations de bonne pratique pour améliorer la qualité de la prise en charge graduée des obésités les plus sévères, qui relèvent des 2e et 3e niveaux de recours (voir ci-après pour le détail). L’objectif est d’améliorer la santé du patient et de lui permettre de revenir à un niveau de sévérité inférieur.

Ce travail, qui actualise la recommandation de bonne pratique sur la prise en charge médicale de premier recours publiée en 2011, sera suivi par la publication à l’automne du parcours de soins pour la prise en charge du surpoids et de l’obésité chez l’adulte et en début d’année prochaine de la mise à jour de la recommandation sur la chirurgie bariatrique.

 

Un préalable : clarifier les niveaux de recours pour mieux orienter le patient

Caractériser la situation d’obésité est un préalable à la prise en charge du patient afin d’orienter celui-ci vers le niveau de recours adapté. La HAS complète les critères existants pour préciser les différents niveaux de prise en charge, et ainsi établir une gradation des soins.

Alors que la pertinence de classer les niveaux de prise en charge de l’obésité en fonction seulement de l’IMC (poids en kg/taille² en mètre) et du tour de taille est remise en cause, la HAS propose de conserver ces deux critères, et de les compléter en intégrant d’autres paramètres. Elle préconise ainsi de prendre en compte également le niveau de sévérité des pathologies associées, le retentissement fonctionnel de l’obésité (essoufflement, douleurs…), le contexte psychopathologique, l’existence d’un handicap, le comportement alimentaire ainsi que le retentissement de la maladie sur la qualité de vie personnelle ou professionnelle. La HAS précise également la typologie des intervenants pour chaque niveau de recours. Elle positionne le médecin généraliste en tant que coordonnateur de la prise en charge de niveau 1, le médecin spécialiste pour le niveau 2 et confie la coordination du 3e niveau de recours aux Centres spécialisés de l’obésité (CSO) et centres hospitaliers universitaires (CHU).

 

Une prise en charge nutritionnelle modérée et progressive pour des résultats durables

Si la mesure de l’IMC constitue toujours un des critères de classification d’une situation d’obésité, la prise en charge de l’obésité n’a pas pour seul objectif la perte de poids. Elle vise également à agir sur les comorbidités, les facteurs de risque, la qualité de vie et la mobilité. La HAS recommande une indication de perte de poids personnalisée, adaptée au patient et en accord avec celui-ci, à l’issue d’une évaluation globale prenant en compte son âge, les commorbidités associés, sa capacité à s’investir pleinement ou encore ses objectifs. Pour les patients âgés de plus de 70 ans, la HAS insiste sur la nécessité dêtre particulièrement vigilant au risque de réduction significative de la masse musculaire, de fragilité et de dénutrition que peut entraîner ou aggraver une perte de poids.

D’un point de vue nutritionnel, la HAS préconise une réduction modérée et personnalisée des apports énergétiques afin de tendre vers une perte de poids durable. Elle recommande un changement du comportement alimentaire régulé par les signaux internes de faim, de rassasiement ou de satiété, ainsi que la prise en compte de la composante émotionnelle de l’alimentation. Si la HAS déconseille la mise en place de régimes déséquilibrés ou très restrictifs, comme le régime cétogène ou le régime Atkins, une alimentation de type méditerranéen peut être intéressante, du fait de ses bénéfices sur la santé.

 

Modifier les modes de vie en misant sur l’activité physique, l’éducation thérapeutique et un accompagnement psychothérapeutique

Pour accompagner la prise en charge nutritionnelle, la HAS pose des objectifs en matière d’activité physique à adapter aux capacités du patient et à atteindre progressivement. Conformément à la définition de l’OMS, cet activité physique peut prendre la forme d’activités de détente et loisirs (jeux, matchs, sport…), de déplacements (marche, vélo, ...), de travaux ou de ménage. La HAS préconise ainsi de pratiquer chaque semaine au choix : 2h30 à 3h d’activité physique modérée (qui correspond à un effort de 5-6 sur une échelle de 0 à 10 en termes de souffle), 1h15 à 2h30 d’activité physique plus intense (qui correspond à un effort de 7-8 sur une échelle de 0 à 10 en termes de souffle) ou une combinaison équivalente d’activités  modérées et intensives. Cette pratique est à accompagner par des séances de renforcement musculaire, au moins deux jours par semaine. Il est également recommandé de diminuer les périodes de sédentarité et de les rompre régulièrement par du temps d’activité physique de faible intensité (voir plus haut). La HAS souligne que ces recommandations, en plus d’agir sur l’obésité, sont également utiles pour prévenir ou limiter d’autres maladies chroniques que les personnes en situation d’obésité risquent de développer (diabète, cancer, arthrose).

Quand l’évaluation psychologique ou psychiatrique en identifie le besoin, un accompagnement psychothérapeutique des troubles associés, du rapport à l’alimentation, du rapport au corps, des évènements de vie et des conséquences de l’obésité est proposé au patient en respectant la pluralité des approches.

Quelle place pour les soins de suite et de réadaptation (SSR) dans cette prise en charge ?

Les indications d’un SSR spécialisé sur les différentes comorbidités (digestives, endocriniennes, diabétologiques ou nutritionnelles), dans le cadre de la prise en charge de l’obésité sont les suivantes  :

  • situations somatiques graves ou invalidantes ou comportant plusieurs comorbidités ;
  • suite de soins aigus pour les patients nécessitant des équipements adaptés ;
  • séjour de « rupture » prolongée ;
  • rééducation locomotrice en cas de perte d’autonomie liée à l’obésité ;
  • patients en échec de prise en charge et adressés par les différents acteurs du niveau 3.

 

Parce que la démarche éducative est indissociable de toute prise en charge, la HAS préconise la mise en œuvre de programmes d’éducation thérapeutique du patient (ETP) pour lui permettre de participer pleinement à la modification durable de son mode de vie. Cette ETP doit être personnalisée, centrée sur une évaluation des besoins, une formulation des objectifs éducatifs avec le patient, et organisée en continu avec des séances individuelles et collectives. La HAS recommande la mise en œuvre de programmes multi composantes, pour améliorer les habitudes de vie et multi professionnels pour faire converger les compétences. Cette démarche éducative est à développer en proximité afin d’améliorer l’accès aux soins et l’accompagnement des personnes dans la durée.

 

En cas d’échec de la prise en charge nutritionnelle (moins de 5% de perte de poids à six mois), et si celle-ci a été bien conduite sur le plan du comportement alimentaire et de l’implication du patient, une prise en charge médicamenteuse peut être envisagée. La décision d’un éventuel traitement médicamenteux relève des niveaux de recours 2 et 3. A l’occasion de cette recommandation, la HAS refait le point sur les traitements utilisables.

 

[1] Enquête Obepi 2020

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